Par un arrêt du 29 juin 2021, la Cour d’appel de Toulouse a infirmé un jugement rendu par le tribunal de commerce de Toulouse et a condamné un assureur à garantir un restaurateur des pertes d’exploitation subies pendant les périodes de fermeture administrative imposée dans le cadre de la lutte contre l’épidémie de Covid 19.

Cette affaire se présente ainsi : 

Un restaurateur avait souscrit une assurance professionnelle multirisque petites et moyennes entreprises auprès de la société AXA FRANCE IARD, pour l’exploitation de son activité de restauration.

Aux termes du contrat, AXA garantissait le restaurateur des pertes d'exploitation consécutives à une fermeture administrative pour cause d'épidémie.

Toutefois, le contrat prévoyait également une clause d’exclusion, ainsi libellée : 
« Sont exclues :
- les pertes d’exploitation, lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement quelle que soit sa nature et son activité, fait l’objet, sur le même territoire départemental que celui de l’établissement assuré, d’une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique ».

A partir de mars 2020, le restaurateur a été contraint de cesser son activité à la suite des mesures de fermetures administratives imposées dans le cadre de à la lutte contre le Covid 19.

Le restaurateur a déclaré le sinistre à son assureur et lui a adressé une attestation de son expert-comptable sur les pertes d’exploitation effectivement constatées pour les mois de fermeture administrative.

AXA a refusé sa garantie en opposant la clause d’exclusion de garantie contenue au contrat susvisée. 

Le restaurateur a saisi le tribunal de Commerce aux fins de voir prononcer la nullité de la clause d’exclusion de garantie et obtenir la condamnation d’AXA à le garantir de ses pertes d’exploitation.

Par jugement du 18 août 2020, le tribunal de commerce a débouté le restaurateur de l'ensemble de ses demandes en considérant que la clause d’exclusion prévue au contrat d’assurance était applicable.

Le restaurateur a interjeté appel de cette décision. 

Le restaurateur considère que le risque est garanti puisque les conditions contractuelles étaient réunies à savoir : 
- Une décision de fermeture prise par une autorité administrative compétente,
- Laquelle était la conséquence d’une des causes prévues par le contrat à savoir une épidémie.

Il considère en outre que la clause d’exclusion est nulle car ambiguë et sujette à interprétation ce que la rend non conforme à l’article L 113-1 du code des assurances.

Suivant l’argumentation du restaurateur, la cour d’appel a infirmé le jugement rendu par le tribunal de Commerce en rappelant que la fermeture du restaurant avait été ordonnée en application de l’arrêté ministériel du 14 mars 2020 en raison des menaces sanitaires graves et notamment les menaces d’épidémie. 

La Cour d’appel a donc considéré à juste titre que les deux conditions de la garantie posées par le contrat étaient bien réunies, dès lors que la fermeture administrative du restaurant a été ordonnée par une autorité administrative en raison d’un risque d’épidémie.

Sur la clause d’exclusion, la cour d’appel rappelle qu’en vertu de l’article L 113-1 du code des assurances, l’exclusion conventionnelle de garantie doit être formelle et limitée

Une clause d’exclusion doit donc se référer à des critères précis, des hypothèses limitativement énumérées qui excluent toute interprétation, de façon à permettre à l’assuré de connaître exactement l’étendue de la garantie et être en mesure de la comprendre

En l’espèce, la Cour d’appel a considéré que la clause d’exclusion telle que libellée dans le contrat recelait de nombreuses imprécisions et qu’en raison de la généralité de ces termes l’assuré n’était pas en mesure de connaître exactement le périmètre de l’exclusion de garantie.

La cour d’appel reproche à AXA de ne pas définir les termes utilisés notamment les notions de « cause identique » ou d’épidémie, laquelle se distingue de la maladie contagieuse ou de l’intoxication.

Elle conclut, qu’au regard du libellé de la clause, le restaurateur ne pouvait pas comprendre les cas pour lesquels il était assuré et ceux pour lesquels il ne l’était pas

« Ainsi, dès lors que l’imprécision des termes utilisés ne permet pas de circonscrire clairement le périmètre de l’exclusion et qu’il est nécessaire de se livrer à leur interprétation, la portée de l’exclusion n’apparaît pas nettement et la clause ne permet pas à l’assuré de délimiter avec certitude le champ dans lequel la garantie n’est pas due.

La démonstration est donc faite que la clause d’exclusion de garantie n’est ni claire, ni précise, ni limitée au sens de l’article L 113-1 du code des assurances et qu’en toute hypothèse, elle n’a pas été explicitée auprès de l’assuré dans le sens que l’assureur comprend. Elle doit donc être annulée en application de ce texte ».

Sur le montant de l’indemnisation due au restaurateur la cour d’appel a désigné un expert pour évaluer les pertes d’exploitation.

A noter que dans un jugement du 28 juin 2021, le tribunal de Commerce de BEZIERS a également fait droit à la demande d’indemnisation d’un restaurateur au titre des pertes d’exploitation subies pendant les périodes de fermeture administrative. 

Dans cette espèce, la clause d’exclusion de garantie était circonscrite aux intoxications alimentaires. 

Le tribunal de Commerce a donc, à juste titre, considéré que pour l’épidémie de Covid 19 la clause d’exclusion ne pouvait pas s’appliquer.