Le caractère d'ordre public de la loi du 6 juillet 1989 ne fait pas obstacle à la conclusion d’une convention d'occupation précaire entre un vendeur et un acquéreur, dans l'attente de la signature de l'acte authentique de vente.

C’est ce qu’a jugé la Cour de cassation dans un arrêt du 6 mai 2021, n°20-10992.

L’affaire se présentait ainsi :

Le 30 juin 2016, M.X a consenti à M.Y une promesse de vente d'un appartement.

Le même jour, les parties ont conclu devant notaire une convention d'occupation précaire autorisant M.Y à occuper ledit appartement dans l'attente de la signature de l'acte authentique de vente et notamment de l’obtention par M.Y d’un prêt bancaire.

La vente n’est pas intervenue et M.Y s’est maintenu les lieux. 

M.X a donc été contraint de l’assigner en expulsion, paiement d'une indemnité d'occupation et dommages et intérêts.

La Cour d’appel d’Angers a constaté que M.Y était occupant sans droit ni titre et a ordonné son expulsion.

M.Y s’est pourvu en Cassation faisant valoir que « la validité d'une convention d'occupation précaire dérogatoire aux dispositions d'ordre public de la loi du 6 juillet 1989 est subordonnée à la caractérisation de l'existence, au moment de sa signature, de circonstances particulières indépendantes de la seule volonté des parties justifiant le recours à une telle convention ; que l'acquisition, par l'occupant, du bien faisant l'objet d'une convention d'occupation précaire, conclue dans le but exprès de permettre à l'acquéreur d'entrer dans les lieux avant réalisation de l'acte authentique de vente, ne constitue pas une circonstance particulière indépendante de la seule volonté des parties justifiant le recours à une telle convention, nonobstant la clause de la promesse de vente dudit bien subordonnant la réalisation de la vente à l'obtention d'un prêt bancaire ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 2 de la loi précitée du 6 juillet 1989, ensemble l'article 1134, devenu 1103 du code civil ».

M.Y tentait ainsi de faire requalifier la convention d’occupation précaire en bail d'habitation soumis à la loi du 6 juillet 1989.
 
Par son arrêt du 6 mai 2021, la Cour des cassation a rejeté l’argumentation de M.Y et l’a débouté de ses demandes en relevant que :

« La cour d'appel a relevé que l'intention commune des parties, expressément consignée dans l'acte du 30 juin 2016, avait été de permettre à M.Y, moyennant une redevance modique, d'occuper les lieux pendant une durée de neuf mois, expirant le 31 mars 2017, en l'attente de la signature de l'acte authentique de vente qui était conditionnée par l'obtention d'un crédit immobilier.

Elle a ainsi caractérisé l'existence de circonstances particulières, indépendantes de la seule volonté des parties, permettant de retenir la qualification de convention d'occupation précaire et justifiant le rejet de la demande de requalification du contrat en bail d'habitation soumis à la loi du 6 juillet 1989 ».

En l’espèce, la circonstance particulière, indépendante de la seule volonté des parties, résidait en l'obtention d'un prêt bancaire par l'acquéreur.

D’autre part, la Cour de cassation a confirmé la condamnation de M.Y au paiement de dommages et intérêts en relevant que le maintien dans les lieux de M.Y avait empêché M.X de disposer de son bien, qu'il souhaitait vendre pour se procurer un capital, et que cette situation lui avait causé un préjudice non entièrement réparé par l'octroi d'une indemnité d'occupation.