Une QPC (question prioritaire de constitutionnalité) a été posée à la Cour de cassation par des bailleurs à l’occasion d’un litige portant sur la fixation du loyer d’un bail renouvelé (Cass. 3ème civ., 12 novembre 2020, n°20-15.179).

L’espèce se présentait ainsi : 

La société Elhil était locataire d’un immeuble à usage commercial appartenant aux consorts X, moyennant un loyer annuel de 17 268,60 euros.

Après avoir refusé le renouvellement du bail, les consorts X ont finalement exercé leur droit de repentir et ont consenti aurenouvellement du bail.

Par arrêt du 11 février 2020, la cour d’appel de Limoges a fixé le loyer du bail renouvelé à la somme annuelle de 12 000 euros.

Les bailleurs soutenant que l’absence de limite à la baisse du montant du loyer portait atteinte au droit de propriété et au principe d'égalité ont posé la question prioritaire de constitutionnalité suivante :

« Les articles L. 145-33 et L. 145-34 alinéa 1er du code de commerce sont-ils contraires au droit de propriété garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et au principe d’égalité garanti notamment par les articles 6 et 13 du même texte fondamental et par l’article 3 de la Constitution de 1958 ? »

La Cour de cassation a refusé de renvoyer cette question au Conseil constitutionnel en estimant que cette question n'était pas nouvelle et ne présentait pas un caractère sérieux. 

A l’issue de son examen de la question prioritaire de constitutionnalité posée, la Cour de cassation a ainsi considéré que : 

1. Le Conseil constitutionnel ayant déjà eu l’occasion d'interpréter ces dispositions, la question posée n’est pas nouvelle.

2. Le moyen de l’atteinte au droit de propriété invoqué par les demandeurs ne présente pas un caractère sérieux.

La Cour de cassation relève, à cet égard, que : 

- Les dispositions contestées ne sont pas d’ordre public et les parties peuvent les écarter afin de fixer d’un commun accord le prix du loyer du bail renouvelé ; 
- En outre, à l’issue de la première période triennale, le bailleur peut demander la révision du loyer et éventuellement compenser partiellement ou totalement la perte de revenus subie lors du renouvellement du bail ;
- Enfin, la fixation du loyer à la valeur locative, y compris à la baisse, correspond au juste prix du bail, déterminé après expertise contradictoire et sous le contrôle du juge, compte tenu des caractéristiques matérielles du bien et de l’état du marché locatif.

3. La question posée ne présente pas davantage un caractère sérieux en ce qu’elle invoque une atteinte au principe d’égalité.

La Cour de cassation relève, à cet égard, que : 

- Le bailleur et le preneur ne sont pas dans une situation identique, de sorte que le législateur est fondé à les soumettre à un traitement différent afin d’assurer la protection du preneur contre la surélévation du loyer en cas de dégradation de l’environnement économique du bail ;
- Cette différence de traitement est limitée, proportionnée et en rapport avec l’objet de la loi qui l’établit.

La Cour de cassation conclut donc que la fixation du loyer à la valeur locative, sans plancher à la baisse, n’est pas contraire au principe d’égalité. En conséquence, elle refuse de transmettre la question au Conseil constitutionnel.